Silvano Danesi

Marzo 20, 2008

Introduction

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GUILLAUME DES AUTELS ET SA VIE

Guillaume des Autels naquit à Charolles dans l’ancienne province de l’est de la France: la Bourgogne, en 1529, de Fiacre des Autels, seigneur de Vernoble. Sa famille était apparentée aux Tyard, son cousin était Pontus de Tyard. Charolle, actuellement sous-préfecture de Saône-et- Loire, était alors la capitale du Charollois. Guillaume des Autels était de bonne noblesse.
Plus tard, à Valence, en Dauphiné, Guillaume regretta aussitôt sa chère ville natale, quand il se trouva entre les murs d’une école pour ses études de droit après son cours de lettres et de philosophie. Alors fort jeune, il ne s’y montre pas enflammé par l’étude des lois; il a beau convenir que la culture des lettres peuts’allier à l’exercice de la jurisprudence, il ne songe qu’à se livrer a la poésie dont il fait un éloge immodéré.
En 1549 il se rend à Romans, dans l’Isère; c’est encore un homme du moyen âge, il avait l’esprit rempli d’un immense bruissement: il n’en avait tiré aucune forme; écrivain né, il n’avait rien écrit, mais cette stérilité va prendre fin, aussitôt il commença une conversation avec lui-même, conversation laborieuse entamée le matin, continuée jusqu’au soir, qui l’occupera jusqu’à son dernier jour.
Il entre en rapport avec les cercles lyonnais, mais il fut révélé au public par Ronsard, un de ses amis, comme un de ceux qui formaient la Pléiade.
Rencontrant, à Romans, celle qui va devenir sa “Saincte” il chantera cette femme exactement comme Olivier de Magny fera pour sa Castianire et Jacques Tahureau pour son Admirée[1].
A cette époque, l’auteur n’étant alors âgé que de vingt-quatre ans et sa maîtresse de vingt[2].
Après avoir connu sa Sainte, Guillaume des Autels se prend à pétrarquiser et il publie des recueils de poèmes amoureux.
Après avoir écrit “Dum spero Meliora” et “Le Mois de Mai”, petit livre fort rare, il écrit “Le Repos de plus grand travail”, qui est un recueil contenant toutes les poésies composées par l’auteur depuis sa quinzième jusqu’à sa vingtième année ;
La suite du Repos qu’il adresse à la Sainte.
Le livre contient plusieurs sonnets, épigrammes et odes avec une épître en vers a sa maîtresse. L’amoureux Repos et encore Façons Lyriques que l’auteur divisa par tours, retours et en chants. Il leur donne des noms ridicules et qu’il tache pourtant d’autoriser par quelques observations dans un Advertissement sur lecteur[3]
Déjà sa Répliqueà Louis Meigret amorçait, en 1550, son glissement vers Ronsard: en 1553, il figure dans la première liste que le futur chef de la Pléiade donne de ses amis.
L’homme qui écrivait la Réplique à Louis Meigret , c’était un tout jeune homme qui avait laissé de côté toute acrimonie et toute exagération, apportant dans le débat une réserve polie, une sage modération, qui font ressortir davantage encore la justesse de sa critique et la finesse de son esprit. Tout en répondant à son adversaire, il était amené à dire son sentiment sur la réforme autrement importante proposée par Du Bellay.[4].
Des Autels était alors un conservateur. Il prend donc parti contre la nouvelle école, défend assez spirituellement Marot et s’efforce, lui aussi, non sans succès, de réhabiliter ces genres antiques et nationaux, que les novateurs traitaient dédaigneusement d’épicerie. Ses critiques contre la théorie de l’imitation ne sont pas moins sensées et moins fondées, mais il se montre conciliant. Pas de proscriptions à priori et sans raisons sérieuses: la Justice pour tous à la lumière de la Vérité. Et voilà pourquoi il veut bien admettre l’ode, telle que la prend Ronsard, mais il réclame hautement pour les chansons de Saint-Gelays. “En ne me saurait-on oster de la fantasie que Laissez la verde couleur et Amour avecque Psichés, quelque nom que leur donnent ceux qui veulent bailler des titres aux oeuvres d’autrui, sont vraiment oeuvres poétiques, bien ornées de figures conve nantes à leur sujet”[5].
Des Autels se réjouit de voir l’effort des novateurs porter si haut la poésie que désormais “nous approchons bien près du sommet de la montagne”; mais il estime, pour sa part, qu’ils manquent de justice envers leurs devanciers, et que ce dédain brutal du passé n’est pas exempt d’ingratitude: “Encore me displait il, que ceux qui pensent avoir conquisté l’empire de l’encyclopédie des Muses, se connaissent trop, ou (pour mieux dire) ne se connaissent pas assez: car comme je loue (laissez moi ainsi parler) leur érudite hardiesse, d’avoir plus osé que nos majeurs: aussi ne puis-je prendre en gré leur méconnaissance, que je ne dis ingratitude, envers ces bons pères, de les vouloir ainsi descrire : comme les fausses monnaies”[6].
Peut-être que lui restait à apprendre son métier d’écrivain, mais il n’est jamais aride, tout ce qui est banal se transforme en poésie, simple et humaine.
Suivent des années de silence, remplies de vaines démarches auprès des Grands; la Charollais, sa province, cédée au roi d’Espagne par le traité de Cateau-Cambrésis, il passe aux Pays-Bas, séjourne à Anvers, ambitionne vainement le titre d’historiographe de Philippe II. Sa Remonstrance au peuple françois et sa Harenque au peuple françois contre la rebellion, se rattachent à ces épisodes.
La harangue en prose est un discours politique plein de figure oratoire qui mérite d’être lu par ceux qui aiment l’éloquence française de son siècle. Il fut imprimé à Paris, l’an 1560, avec trois églogues du même auteur, sur la paix et sur la guerre.[7]
Avant de terminer la liste des œuvres de Des Autels, il faut citer Ecomium Galliae Belgicae G. Altario Carolate authore ; accesserunt et alii aliquot ejusdem versiculi ,in 8°, livre extrêmement rare.
A partir de 1559, il est partisan des Guises et défend le catholicisme, avec des accents dignes de Ronsard dans l’Elogie de la Paix.
On lui attribue aussi l’œuvre qui l’intéresse le plus, il s’agit d’une fantaisie rabelaisienne: Mithistoire barragouyne de Fanfreluche et Gaudichon. (1574).
Rentré à Paris, il y mène, parmi de flatteuses amitiés littéraires, une existence médiocre. Il connut avec les années des heures graves où s’abolit peu à peu le souvenir de ses ardeurs juvéniles. Il ne se souviendrait, peut-être plus le nom de sa “Sainte”, si vivement célébrée. On ne s’accorde pas sur la date de sa mort. (1581 ?)

GUILLAUME DES AUTELS ET SES AMIS

Guillaume des Autels est encore jeune quand il rencontre la plupart de ceux qui devaient devenir ses amis.
Il y a aussi Ronsard, surtout Pierre de Ronsard, qui avait une culture très vaste.
La rencontre de Pierre de Ronsard fut un événement déterminant dans la vie de Guillaume des Autels parce que Ronsard avait contracté une amitié très particulière avec des Autels.
Pierre de Ronsard est un jeune gentilhomme vendomois, obligé dit-on, par une surdité précoce, de renoncer à la cour. Il se remet à l’étude; pendant sept ans, avec un de ses amis, Antoine de Baïf, il travaille le grec et pratique les écrivains anciens sous la direction de l’helléniste Daurat.
Quand Ronsard rencontre Des Autels, ils deviennent amis, d’autres se groupent autour d’eux: Joachim Du Bellay, Baïf, Belleau, Jodelle et La Pérouse.
Guillaume des Autels avait de l’amitié non pas une idée mystique seulement, mais un sentiment mystique, ainsi naquit entre lui et Pierre de Ronsard cette amitié, cette fidélité parfaitement échangée, parfaitement nourrie. Des Autels avait cette fidélité à soi-même qui est tout de même l’essentiel.
Cet accord saisissant de l’esprit, du rire, qui n’attend pas, qui ne calcule pas, qui d’un coup atteint au plus profond, au dernier point, éclate et révèle.
D’autre côté, l’amitié que Pierre de Ronsard avait pour Guillaume des Autels, avait quelque chose de désarmant.
Outre ce que Ronsard a dit de lui dans plusieurs vers, il lui adresse encore un sonnet qui se lit dans ses oeuvres imprimées dès l’an 1553[8] qui commence ainsi:
“Sur un autel sacré je veux sacrer ton dos
Mon dévôt des Autels, los qui la France honore”
Ajoutons que là ne se bornent point les éloges adressés par le maître de la Pléiade au poète Charolais.
Indépendamment du poème déjà cité on trouve encore son nom dans les pièces suivantes: premier livre des Amours, Amours diverses, deuxième livre des Odes, Le bocage royal, l’Ode à Jean de la Perouse, Poèmes et enfin dans les Iles fortunées.
Mais le destin préparait a Guillaume des Autels plusieurs rencontres qui devaient être décisives pour sa carrière d’écrivain et pour sa vie spirituelle.
Claude Binet met des Autels au rang des premiers poètes qui avaient commencé de bien écrire en français, assurant qui s’était là le sentiment.
Joachim du Bellay lui dédie un beau sonnet:
“Et toy encor’dont le laurier enserre
Le jeune front, et qui eus ce bonheur
De consacrer d’une Saincte l’honneur
Sur tes autels ombragés de lierre”.
Dans son livre des Allusions latines c’est ainsi qu’il se joue agréablement sur le nom de des Autels sur celui de sa Sainte:
“Impositum tibi sit sacris quod nomen ab aris,
Hanc causam Altari nempe fuisse puto
Vel quia formosae casto sub nomine sanctae
Idaliae matri sacra pudica facis
Vel quia Musarum pystes Phoebique sacerdos
Et Phoebum et Musas numina nostra colis”.[9]

Olivier da Magny le met au rang des célèbres esprits qu’il exhorte de chanter la naissance de Marguerite, fille du roi Henri II.
Charles Fontaine, honore son mérite en vers.
Charles Rouillon, l’un de ses intimes amis, parle très honorablement de lui, et Louis Le Caron dans son poème du Ciel des Graces le nonme au nombre des poètes signalés de son siècle.
Pontus de Tyard, son cousin et son ami, dans son Chant lyrique, en faveur de quelques excellents de son siècle, n’y oublie pas des Autels duquel il parle hautement de la sorte:
“Dea, que ne sont immortels
Ces vers que je vueil desperdre
Pour faire la gloire entendre.
De mon jeune Des Autels,
Qui a en ses premiers ans
Fait preuve tant honorée
De sa plume enamourée
Et qui le tort a remis
Au front de ses ennemis.
Sus logez-le au rang des Grands
Que le Ciel luy a promis”. [10]
L’admiration et l’amitié de tous ces personnages laissa des traces dans l’esprit de Guillaume des Autels, leur sensibilité, leur intelligence, leur amitié ont parlé avec naturel, ils apparurent à Des Autels dans leur réalité d’hommes.

LA PLEIADE

J’ai dit que Guillaume des Autels en 1553 figure dans la première liste des amis de la Pléiade. Et que-est-ce que la Pléiade?
Pierre de Ronsard forme la “Brigade”, qui bientôt et plus superbement devint la Pléiade qui devient ensuite: champion de la nouvelle poésie française.
La Pléiade est aristocratique et érudite: elle a pour chef un courtisan, elle compte un helléniste, qui n’a pour ainsi dire rien écrit en français. “Odi profanum vulgus” est sa devise et son principe: dans l’école de Marot, c’est la toute populaire facilité, le terre-à-terre familier de la poésie frivole qu’elle poursuit. Elle méprise ces poètes de cour, guidés comme dit Du Belley.
“Par le seul naturel, sans art et sans doctrine”. Elle apporte, elle, un art savant, une exquise doctrine: l’art et la doctrine des Grecs et des Romains, des Italiens aussi, qui sont à l’égard de nos Français, comme on l’a déjà vu, la troisième littérature classique.
Elle apporte une haute et fière idée de la poésie, qu’elle tire de la domesticité des grands, qu’elle interdit à la servilité intéressée des beaux esprits.
Pour la Pléiade, la poésie consiste dans l’union intime, indissoluble, du génie et de la culture, de la fureur, et du savoir, de l’enthousiasme et de la réflexion, de l’inspiration et de l’art. Cette admirable conception, comment l’a-t-elle réalisée?
De l’inspiration, il n’est pas de loi: l’esprit souffle où il veut. Mais l’art est astreint à des règles, aussi sévères que précises.
Dès l’origine, la Pléiade a proclamé très haut que l’art a son principe dans l’imitation des modèles. “Tout est dit, et l’on vient trop tard”. ». Il faut donc se résoudre à glaner après les anciens et les plus habiles d’entre les modernes, c’est-à-dire les Italiens.
“Sans l’imitation des Grecs et Romains, nous ne pouvons donner à notrelangue l’excellence et lumière des autres plus fameuses”, écrivait Du Bellay, dans sa Deffence.
On a dès longtemps affirmé qu’en formulant ainsi le principe de l’art, en lui assignant pour objet la pure imitation des modèles classiques, la Pléiade instaurait chez nous la doctrine du classicisme. On ne saurait nullement contester une affirmation aussi judicieuse.
Il n’est plus douteux pour personne qu’en dépit des condamnations et des reniements dont ont pu se rendre coupables des petits-fils ingrats et peut-être inconscients, Ronsard et ses amis ne soient les très authentiques ancêtres des grands ouvriers, des grands créateurs qui, dans l’âge suivant, ont élevé le classicisme à son degré de perfection. Mais avant de pousser plus loin et d’examiner en détail quelle série d’applications les poètes de la Pléiade ont méthodiquement faite de leur principe, il est urgent de présenter quelques remarques préalables, et d’apporter du même coup quelques réserves qui s’imposent.
Dès l’abord on pourrait, avec Guillaume des Autels, et plus tard avec Jacques Peletier, par lequel il est remplacé, se demander si le vrai principe de l’art est forcement l’imitation, et si l’on ne peut concevoir un poète assez libre, assez indépendant, pour se passer de tout modèle.
Pétrarque, disait des Autels, n’a spécialement imité aucun auteur Grec ni Latin: pourquoy desperons nous d’en faire autant ou plus?
Ensuite Peletier affirme à son tour: “il ne faut pas que le poète qui doèt exceler, soèt imitateur juré ni perpetuel ”.
Pour conclure on dira que la Pléiade tirait un double enseignement.
C’est d’abord que la poésie doit être autre chose qu’un futile agrément: qu’elle doit s’élever, bien au-dessus de l’expression des fantaisies individuelles, à l’expression des idées pures; qu’elle doit être capable de soutenir la pensée dans ce qu’elle a de plus sublime; qu’elle doit avoir, en un mot, une portée philosophique qui dépasse la sphère du simple sentiment.
Et c’est aussi que la poésie - tel un culte religieux - demande, en conséquence, une initiation; qu’elle n’est pas immédiatement accessible au premier venu, que sous peine de rester basse, rampante, terre-à-terre, elle doit s’affranchir des goûts médiocres et de la foule, dédaigner le vulgaire ignorant et grossier.

PRESENTATION DE L’OEUVRE

C’est à Valence que Guillaume des Autels conçut pour la première fois l’idée d’écrire la Mitistoire. A l’appui de ma déclaration je cite l’abbé Goujet qui nous informe que: “ce fut durant son séjour à Valence, qu’il (Guillaume des Autels) fit à l’imitation du Pantagruel de Rabelais, un petit ouvrage qu’il intitula Fanfreluche.[11]
La Mitistoire n’est pas un des plus beaux traités de technique qui aient été écrits par un homme de métier, mais elle est une oeuvre qui reflète l’expérience de Guillaume des Autels et qui la fixe dans un cadre suffisamment vaste pour qu’aucune des questions essentielles de son art ne soit négligée. Les soucis, les Choix nécessaires, tous les dessous de l’artisan sont, dans ce texte, découverts. Cette oeuvre nous installe en effet à l’intérieur de l’atelier du “créateur” nous en livrant une large partie de la façon dont il opérait et qui nous montre une sorte de panorama de sa conscience d’artiste, et donc le déploiement d’une grande part de sa vie intérieure.
Divisé en deux parties, on peut dire de ce livre qu’il ne roule que sur un sujet: l’amour de Fanfreluche et de Gaudichon. L’amour y est exalté et quelquefois abaissé, mais ce que l’auteur se propose en réalité, est de passer en revue les principales questions d’amour, qui représentent l’aspect le plus curieux et caractéristique du livre.
La Mitistoire est une oeuvre comique, une imitation que (Bever) appelle “médiocre mais curieuse”[12] du Pantagruel de Rabelais, et qui eut la singulière destinée d’être condamnée par l’Inquisition en 1582.
Elle est dédiée à François Rabelais, parce que dans le “Suradvertissement” on peut lire “A F. R.”.[13]
L’œuvre, publiée anonyme, a un curieux “Avis au lecteur”, écrit par l’auteur même:
“Notez que pour sçavoir et trouver le nom de l’autheur, il faut oster les lettres superflues, et faire servir les autres autant de fois qu’il sera besoing”.[14] Après avoir lu cette préface, le lecteur qui d’abord, peut être, n’avait pas l’intention de lire entièrement l’œuvre, sera tenté, après tout cela, de connaître les théories de l’auteur.
” Il s’agit d’un livre fort peu connu, faisant partie de la famille rabelaisienne”, dit Brunet;[15] il est connu seulement par les bibliophiles les plus doctes et l’auteur a voulu suivre l’exemple du curé de Meudon; la page du titre même l ‘indique”. A propos du titre il est nécessaire de faire une intéressante observation: le premier mot “Mitistoire” dérive de muthos (ou plutôt de mitis, comme dans mitiguer) et “Histoire” y est pour histoire mensongère.
Dans sa Mitistoire, Guillaume des Autelz fait des allusions à sa vie. Comme le héros de ce roman va étudier à Paris, au Collège de Bourgogne, on en a déduit que Guillaume des Autelz a pu aller, lui aussi, à Paris.
L’auteur assure qu’il n’a rien écrit qui ne soit vrai.
L’œuvre comprend dix-sept chapitres et se rallie, dans son ensemble, au style de l’école lyonnaise.
Dans ce livre on trouve des allusions à des événements de 1547 et à des questions débattues dans la période 1549-1554.
Elle présente aussi des réflexions hostiles aux religieuses, aux moines, au clergé et à la scolastique[16]
Elle fait l’éloge de Charles Estienne, “Homme duquel la naissance fait grand honneur à Paris”,[17] et de Jean de Coras, professeur de Droit, favorable au protestantisme.
Elle se montre peu favorable à Joachim du Bellay et encore moins à Ronsard, tout en reconnaissant le mérite de ces deux poètes; elle critique l’auteur du Quintil Horatian pour ses attaques excessives et trop violentes dirigées contre la Deffence et Illustration.
Guillaume des Autelz, dans sa Mitistoire, énonce des opinions que l’on ne peut attribuer qu’à lui-même: anti-pétrarquisme, opposition au paganisme, critique des imitateurs de Pindare, éloge des écrivains qui s’expriment clairement et simplement, estime de Pontus de Tyard et dépit à l’égard de l’école de Ronsard.

ATTRIBUTION DE L’ŒVRE A GUILLAUME DES AUTELZ

Cette oeuvre parut pour la première fois à Lyon en 1559, mais cette édition est devenue rare. Elle fut réimprimée diverses fois, entre autre en 1574, sous le titre de Mitistoire Barragouvne de Fanfreluche et Gaudichon. Trouvee depuis naguere d’une exemplaire escrite a la main. De la valeur de dix Atomes pour la recreation de tous bons Fanfreluchistes. Autheur
” a b c d e f g h i k l m n o p q r s t v x y z 9 ”
On peut se demander quelles indications la Mitistoire peut nous fournir sur son auteur.
Sur la page du titre on peut lire les vingt-trois lettres de l’alphabet et une marque d’abréviation: 9 (neuf).
On attribue communément le livre à Guillaume des Autelz, bien que l’œuvre porte à la page du titre seulement les lettres de l’alphabet, à la place du nom de l’auteur. Celui-ci indique que pour trouver son nom
“il faut oster les lettres superflues, et faire servir les autres autant de fois qu’il sera besoing”.
[14]
En quoi sommes-nous renseignés?
Sur le frontispice de l’édition de 1574 certaines lettres sont soulignées à l’encre, tandis que cela n’est pas présent dans l’édition de 1578. Or, le nom Guillaume des Autelz (Gvillavme des Avtels) n’est formé que par ces lettres marquées d’un trait. Les lettres qui entrent dans la composition du nom plusieurs fois (a, e, l, s, t, v ) sont soulignées deux fois, et celles employées une seule fois (d, g, i, m ) portent au-dessous d’elles un seul trait. Mais alors pourquoi ce numéro 9, du moment que les lettres marquées sont dix?
Comme les poésies de Guillaume des Autelz révèlent un provincial un peu en retard sur le mouvement du siècle, on a quelques raison pour douter que la Mitistoire soit de Guillaume des Autelz, parce qu’on est surpris de lire, après ses poésies idéalistes et éthérées, un récit si intelligent et un peu hasardé.
En réalité, aujourd’hui, on ne peut pas douter que Guillaume des Autelz ait écrit la Mitistoire.
Dans Les bibliothèques françaises de La Croix de Maine et de Du Verdier
[19] nous lisons que Guillaume des Autelz “a écrit à l’imitation de Rabelais dans son oeuvre de Pantagruel, un livre en prose intitulé Fanfreluche et Gaudichon; Mythistoire Barragouyne, de la valeur de dix Atomes, pour la récréation de tous bons Fanfreluchistes, imprimée à Lyon”.
Sur la paternité du livre de des Autelz, les opinions, toutefois ne concordent pas; voilà ce qu’en pensent les critiques: selon Margaret Young,
“Du Verdier was the first to attribute the Mitistoire to Guillaume des Autelz, would date it between 1546 and 1549″
[20]
Encore, pour Margaret Young, le fait que dans un album de poésies de Guillaume des Autelz, adressé à Maître Bartholomy des places chanoynes en l’église d’Ostun son bon ami et compagnon d’études à Paris, confirme le fait que Guillaume des Autelz étudia à Paris. Il s’agit d’une indication importante qui est susceptible d’établir que des Autelz est l’auteur de la Mitistoire.
Selon Jacques Boulenger[21]: “Rien n’est moins sûr d’ailleurs, que l’attribution de la Mitistoire Barragouine à Guillaume des Autelz.”
Dans une lettre d’Etienne Pasquier à Ronsard, on peut lire que l’auteur du Livre des Fanfreluches “est ici démasqué”; et dans une note se trouve cette remarque:
“J’ai vu ce mauvais petit livre de cent pages in 16,réimprimé à Rouen en 1578 chez Nicolas l’Escuyer. Rien n’est plus fade. (M. de la Monnoye)
“.[22]
Voilà donc, comment on a attribué le Livre des Fanfreluches à Guillaume des Autelz, mais, comme dit Françon, “les preuves qui justifieraient cette attribution ne sont pas présentées”.[23]

DATE DE COMPOSITION DE LA MITISTOIRE

Il est impossible de déterminer avec précision la date de composition de la Mitistoire; nous pouvons la pIacer approximativement dans les années 1550-1551.
Dans le “Proeme” de la Mitistoire on lit:
“Celuy qui se veut mesler d’escrire une histoire,
doit sur tout avoir devant les yeux, qu’il n’escrive
rien qui ne soit vray, car c’est la seule chose qui
le fait nommer Historien: autrement c’est un seducteur,
digne de non moindre punition qu’un faux tesmoing,
pour ce qu’en ces deux mesme raison milite”. [24]
Or, René du Bellay:
“Il me souvient luy avoir ouy dire maintefois (lors
qu’il detestoit les mensonges et adulations d’aucuns
historiographes de son temps) que ceux qui escrivoyent
faux en histoire devoyent estre punis au double des
faux tesmoins”.[25]
Ces Mémoires venaient de paraître (1569) lorsque Mlontaigne se mit à écrire. Leur succès fut d’abord très grand: pendant cinq années (1569-1574); chaque année on en vit paraître une édition, et quelquefois deux.
Dans l’essai II, l0, Montaigne a exprimé des opinions semblables à celles des frères de Bellay.
Il nous semble donc intéressant de rapprocher, les uns des autres, ces différents textes, et nous pourrions peut-être tirer, de ces similitudes de pensée et d’expression, une conclusion sur la date de composition de la Mitistoire.

DATE DE PUBBLICATION DE LA MITISTOIRE

C’est Monsieur Jean Dieppi[26] qui vendait le livre à Lyon en 1574 , petit, in 12º, figures sur bois.
On connaît encore deux éditions de ce livre fort peu connu, l’une exécutée à Rouen, par Nicolas l’Escuyer, en 1578, in16, sans figures, et l’autre, tirée en soixante-deux exemplaires par Crapelet, en 1850, in-8.
On pourrait dire, comme Margaret Young, que la Mitistoire présente de nombreux problèmes: la date de sa première publication est inconnue mais selon V. L. Saulnier[27] le livre a été publié, peut-être, une première fois, en 1559.
Toutefois, les informations que nous donnent les bibliographes sont assez fragmentaires et insuffisantes pour établir la date exacte.

SOURCES

Il est évident, aux yeux du lecteur de la Mitistoire, que son auteur a eu deux sources d’inspiration.
Selon V.-L. Saulnier et Margaret Young, et je concorde avec eux, une des sources de la Mitistoire est l’Amour des Amours, de Jacques Peletier du Mans.
Il y a dans cette oeuvre, comme on sait, une partie qui s’intitule Uranie. Dans le livre qui m’intéresse on peut lire:
“Voyci le premier qui se rencontre un grand personnage portant un bonnet à quatre brayettes, conduisant Urania par dessouz les bras”.[28] Il est évident que Guillaume des Autelz connaissait aussi la Comédie de Dante Alighieri, parce que les rapports entre cette oeuvre du poète italien et la Mitistoire sont assez évidents. D’après Enea H. Balmas:
“Motivi danteschi più o meno camuffati sotto il velo dell’ironia, riscattati in chiave satirica e variamente ‘contaminati’ , con influenze di altre fonti, compaiono anche in altre parti dell’opera dello scrittore francese; si pensi soltanto alla Mitistoire Barragouyne, cui abbiamo già accennato, e alla ‘visita’ compiuta dal protagonista, Gaudichon, sotto la guida di Calliope, nel limbo degli spiriti magni, il Parnaso dei poeti, dopo aver attraversato la foresta ’selvaggia ed aspra e forte’ , aver incontrato diavoli e satiri, figure allegoriche e mitologiche, secondo il più puro rituale dei mistici ‘viaggi’ medievali, recentemente rinverdito dall’esempio di Jean Lemaire de Belges. Jean Lemaire, confessatamente uno dei modelli cui guarda il giovane Des Autelz, é infatti, a nostro avviso, la personalità chiave, il ponte attraverso il quale egli giunge alla conoscenza dell’opera di Dante: conoscenza mediata, in un primo momento, attraverso gli scritti dello stesso Jean Lemaire che, com’é noto, fu tra i primi scrittori francesi cinquecenteschi a subire il fascino del poeta fiorentino; e senza dubbio anche conoscenza diretta, in un secondo tempo”.[29]

IMITATIONS

Selon Brunet,[30] ce récit est une imitation de Pantagruel et l’imitation se montre à chaque page. Je trouve que l’imitation de Rabelais est évidente, mais sans esclavage.
Certains procédés, ou variantes de procédés comme intervention du moi, lapsus, etc., classent des Autelz comme intermédiaire entre son maître Rabelais et les exploiteurs postérieurs de la veine, de Béroalde à M. Arnac.
Selon moi, si des Autelz fait de la parodie ou s’il se moque des gens de l’ église et des Juristes, du milieu universitaire et de la cour, il ne doit rien de tout cela à l’héritage Rabelaisien.
Sa dette envers Rabelais s’épuise en des manières stylistiques, il se limite à quelques paroles et à l’interprétation générale de l’œuvre, mais ce qu’il nous communique, c’est-à-dire la partie plus solide et plus vraie de la création littéraire, est indiscutablement et authentiquement la sienne.
Son ironie ne rejoint pas le sarcasme de son modèle et ceci non parce qu’il n’en est pas capable. En effet, nous voyons que lorsqu’il le voudra, il trouvera les mots, lui aussi, et dans le chapitre XIVe alors qu’il nous présentera Louis Meigret, son adversaire dans la Querelle de l’Orthographe, il n’épargnera pas les épithètes et les phrases les plus grivoises.

INFLUENCES

On doit dire que Guillaume des Autelz dans sa Mitistoire a voulu suivre l’exemple du Curé de Meudon, la page même du titre l’indique.
Dans l’oeuvre nous rencontrons souvent les mots :
Barragouin et Fanfreluche, qui sont typiquement rabelaisiens.
Comme V. L. Saulnier l’a remarqué,[31] dès le titre même de l’ouvrage, deux mots viennent du roman de Rabelais, ou, plus exactement, comme l’indique Margaret Young, le deuxième chapitre de Gargantua s’intitule: “Les Fanfreluches antidotées, trouvées dans un monument antique”. Quant à Barragouin, ce substantif on le lit dans le chapitre IX de Pantagruel .[32]
Margaret Young remarque: “it is rare to find it as an adjective, as here”.[33]
Encore, le sous-titre: “Trouvée depuis naguère d’un exemplaire écrit à la main”, évoque celui de la Sciomachie.
L’auteur même présente Gaudichon comme un pantagrueliste quand il dit avec ris continuels:
” il s’enyvre à la bonne grâce
de ton maître Pantagruel”.[34]
Plus d’un épisode du livre est décalqué de Pantagruel; par exemple la généalogie de Fanfreluche ressemble à celle de Pantagruel, ainsi que les études de Gaudichon.
La dispute publique de ce dernier rappelle, dans son principe, celle de Pantagruel contre le grand clerc d’Angleterre Thaumaste.
La lettre de Happe-Bran à son fils Gaudichon étudiant à Paris, s’inspire largement à la lettre que Gargantua adresse à son fils Pantagruel.
On ne peut pas nier que des Autelz imite Rabelais, mais je trouve qu’il ne le fait pas passivement. Il insère dans son oeuvre des motifs personnels qui n’ont aucun rapport avec l’œuvre rabelaisienne.

PERIODE POLITIQUE

Il Faut rappeler les grands traits de l’époque à laquelle appartient Guillaume des Autelz, et l’histoire du Charolais, dont il est originaire.
“L’année où l’on place la naissance de Guillaume des Autelz fut marquée par le traité de Cambrais (1529)”, dit Françon.[35]
Un aspect politique de ce temps, était la rivalité entre Charles-Quint et François premier.
La formation de l’empire de Charles-Quint entraîna une rivalité armée entre l’Empereur et François premier.
La France qui se trouvait ,encerclée par les Etats de Charles-Quint, lutta pour son existence de 1521 à 1559.
Au cours de cette lutte, François premier s’allia à certains moments avec le Pape, avec les protestants d’ Allemagne et même avec les Turcs musulmans. En 1525, il fut battu et fait prisonnier à Pavie. Charles-Quint essaya de lui prendre la Bourgogne, mais il dut y renoncer. Toutefois la France ne put se maintenir en Italie.
Grâce à une observation plus exacte de la nature, à certains perfectionnements techniques et à l’imitation de l’Antiquité, l’art se développa en Europe. Ce mouvement aboutit à ce qu’on appelle la Renaissance.
Ce fut l’Italie qui montra la voie aux autres pays et qui imposa au XVIe siècle son influence au reste de l’Europe.
A la suite des guerres d’Italie, la Renaissance se propagea en France, où elle suscita surtout des oeuvres d’architecture (châteaux de la Loire, palais de Fontainebleau, le nouveau Louvre, les Tuileries).
Les principaux architectes furent Pierre Lascot et Philibert Delorme.
En France, la Renaissance s’est manifestée également dans le domaine littéraire, sous l’influence des travaux des humanistes Guillaume Budé et Henri Estienne et des encouragements des Rois (fondation du Collège de France).
Les principaux écrivains furent Rabelais, Ronsard et Montaigne.
Nous passons maintenant à l’étude historique du duché de Bourgogne, du Charolais et de “la compté” de Bourgogne, “qui s’appela si longtemps, et qui s’appelle encore, d’un beau nom, la Franche-Compté”.[36]
A la mort de Marguerite (1530) Charles-Quint, son neveu, hérita de la Comté, mais il confia la régence des Pays-Bas, à sa sœur Marie de Hongrie, en stipulant que la Comté ne serait pas séparée des états de Flandre.
Quand Charles-Quint abdiqua, le 10 juin 1556, il remit à son fils Philippe II le gouvernement de la Comté.
Philippe II quitta les provinces flamandes après la paix de Cateau-Cambrésis.
Philibert-Emmanuel redevenu maître de ses états de Savoie et du Piémont, Philippe II donna à Marguerite de Parme, sa sœur naturelle, l’administration des Pays-Bas et de la Comté, mais il ne voulait pas la laisser, seule, se charger d’un gouvernement difficile, et il lui donna un ministre, Antoine de Granvelle. Une des oeuvres de Guillaume des Autelz, La paix venue du ciel, fut dédiée à Granvelle.

CONTENU DE L’OEUVRE

Après ” l’advertissement au lecteur”[37]  et le ” Suradvertissement”[38], dont j’ai déjà parlé, il y
a un “Proeme”[39] de trois pages, qui mentionne les faits remarquables des Barragouins, et il s’agit, ici, non plus d’un langage incompréhensible, mais de personnes qui parlent.
Ensuite, il y a deux parties: la première dont le personnage principal est Fanfreluche. Elle va du premier chapitre au VIIIe chapitre.
Le IIe chapitre est consacré à la généalogie de Franfreluche. Les chapitres III-VII se rapportent au mariage du père et de la mère de Fanfreluche, à l’enfance de celle-ci et à son éducation dans un couvent, à la mort de son père et de sa mère.
La seconde partie, dont la figure dominante est celle de Gaudichon, va du chapitre IXe au XVIe chapitre.
Les chapitres X et XI, nous apprennent quel genre d’études il fit à Paris. Les chapitres XII et XIII nous disent quelles aventures Gaudichon eut en chemin. Le chapitre XIV est consacré aux poètes. Le dernier chapitre nous fait connaître le voyage de Fanfreluche en Rusterie, le pays de son père, et sa rencontre avec Gaudichon.
Dans l’épilogue, sont annoncés quatorze livres qui compléteront ceux qui viennent d’être lus: “Ici vous aurez vu pour cette fois la naissance, le parentage et la jeunesse de l’un et l’autre amoureux. Aux autres vous verrez le discours de l’amour plus plaisament démené, que l’on ne le sonne aux sonnettes de maintenant”.[40]
Les deux parties sont différentes soit dans le langage que dans la structure.
Dans la première partie, nous notons que l’auteur use une forme de dialogue qui se déroule entre Songe-Creux et Fanfreluche. Le récit est raconté par Fanfreluche qui nous informe de son histoire et de sa généalogie et par Songe-Creux, serviteur de Madame Fanfreluche, qui se montre tel quel son nom le défini.
Comme Guillaume des Autelz même dit: “c’est une histoire certes très convenante à Messieurs les gens de bien après que vous serez las de rire les rabelairies de Pantagruel”.
Dans la première partie, la langue est plus obscure que dans la seconde et en certains points, elle rejoint l’obscénité.
Dans la seconde partie, au contraire, nous notons que l’histoire est présentée dans une forme narrative. Le dialogue n’existe plus que comme dialogue se rapportant à l’auteur.
En outre nous voyons que, ici, Guillaume des Autelz se contente de nommer la famille de son personnage. Au contraire, il met en relief sa vie d’étudiant et ses péripéties en ajoutant des détails historiques de ce temps.

S T Y L E

Je trouve que ce livre ne manque pas d’hilarité mordante, hilarité qui est évidente dans le “Suradvertissement”, que je transcris pour mieux rendre cette idée:
“L’auteur écrivant de si grave matière que ceste-cy et de si honneste Dame que Fanfreluche estoit, ainsi magnificquement que vous voyez: et (pour parler signorialement) s’est retiré, comme dit l’autre, du grand chemin des vaches, mais si je trouve un amy qui conqueste une Conté par le squadron des brunettes, filles de Cadmus, pourtraites en son nom, vous en aurez bien tost la scientifique exposition, ne fust ce que pour faire peter les roussins. Quant à l’Escriture on n’en dit mot, attendant la decision du procez entre Meigretistes, et antimeigretistes”.[41]
Le dernier éditeur de l ‘oeuvre, Monsieur Crapelet a dit d’elle: “Quelques joyeusetés drôlatiques que l’on ne lira pas sans plaisir”.
Dans le style qu’emploie Guillaume des Autelz, on peut voir l’influence de Rabelais et de la langue facétieuse de la Renaissance, mais ,du reste, on sait que des Autelz, fit partie du cénacle des Sept, pendant deux ans; il était rallié à la Pléiade naissante.
De son style transparaît l’influence de Rabelais, mais il y a aussi dans les détails que des Autelz emploie, des termes nouveaux, personnels. Le vocabulaire est émaillé et sans plus de rabelaisianismes.
On peut voir la fantaisie particulièrement féconde dans les termes personnels de l’auteur; il y a plusieurs adjectifs accolés à un nom et placés avec art, comme:
“Qui ecumoient de jolies, grosses, petites, Braves baves”.[42]
Et encore: “un bon vieil escervelé advoca t”.[43]
“Le premier cas grand, merveilleux, admirable, épouvantable”.[44]
Dans le texte, il y a des allusions savantes, des étymologies burlesques et l’utilisation du latinisme.
Notre auteur invente d’autres procédés, les développe, ou les modifie.
On rencontre aussi de grossières parodies, des pIaisanteries empruntées au vocabulaire de la défécation, mais on ne peut pas critiquer l’auteur de ce livre seulement pour le style employé. Aujourd’hui, on donne des prix aux écrivains “seulement” parce qu’ils usent un vocabulaire assez épouvantable, violent et vulgaire.
Guillaume des Autelz emploie souvent des proverbes qui se rattachent à des formules sentencieuses d’allure populaire telle que: “Les médecins ne veulent point prendre de medecines … “[45]
La naïveté fréquemment employée chez Rabelais, est considérablement développée et variée chez des Autelz.
Les lapsus sont aussi fréquents, comme la réticence et le brusque changement d’humeur.
Une intervention personnelle est présente dans le style des Autelz: il endosse le rôle de Songe-Creux, pour narrer le tout à la première personne.
Pour conclure, je dirai que dans le style de Guillaume des Autelz, on peut avertir les changements qui se manifestent dans les idées littéraires du temps.

QUELQUES PERSONNAGES

L’histoire des personnages ne nous est pas racontée année par année. Les héros sont vus en de différentes époques.
L’inconvénient de la composition par époques est que nous revoyons les personnages transformés sans avoir assisté à leur transformation.
Gaudichon est un tout jeune homme qui a plusieurs amis. Ses amis lui conseillent d’étudier la médicine chez Monsieur Sylvius à Paris.
Après avoir passé huit jours en compagnie de médecins, il les définie comme: “vrais bailleurs de paraboles”.[46]
Il décide donc de quitter Paris pour se rendre dans une autre Université de France pour y étudier le Droit. Après de nombreuses aventures, et peu d’études, il trouve que: “l’une est fort bonne pour la grande érudition des docteurs et professeurs”.[47]
Après avoir connu Fanfreluche, Gaudichon quitta ses études pour tenir compagnie à cette Demoiselle.
Je juge Gaudichon comme un homme qui se laisse facilement transformer par les événements, bien qu’il reçoive de son père des lettres qui contiennent des conseils d’une haute portée morale.
Songe-Creux, lui est l’écuyer de Mademoiselle Fanfreluche, mais il ne prête aucune attention aux discours de sa maîtresse.
Nous savons que Fanfreluche est obligée de rappeler à l’ordre Songe-Creux par quatre fois afin d’attirer son attention.
Songe-Creux est un savant puisqu’il parle le latin. Ce sera lui même qui fera un distique latin et un quatrain français afin de célébrer le talent de Coras.[48]
Le jeune homme s’excuse de parler latin car il dit: “par ma foy je pensoye estre à Valence, avec les bons frelaux mes compagnons Roberts à faire comme nous soulions sortir de la lecture de ce très-admirable docteur Monsieur de Coras Tholosain”.[49]
Je pense qu’il s’agit d’un “pauvre diable” qui sert sa maîtresse Fanfreluche tout en se moquant d’elle, puisqu’il ne prête aucune attention à ce qu’elle dit, mais pour son discours en latin fait en honneur de Monsieur Coras, on peut le retenir aussi un savant.
Quant à Fanfreluche, il s’agit d’une femme très orgueilleuse; c’est elle même qui déclare: “il n’y a pas princesse en tout le territoire de la Creuse, de plus antique race que moi”.[50]
Son père “Trigory”, vint “du bas pays de Rusterie en ce royaume ici, des Barragouins, où il trouva ma bonne mère la belle Beatrix”.[51]
Fanfreluche fut mise dans un couvent dès l’âge de sept ans; elle n’y reste que deux ans. Elle devait avoir une bonne éducation, mais en fait, elle n’a aucun scrupule et arrive toujours à ses fins.

CE QUE GUILLAUME DES AUTELZ A VOULU DIRE OU FAIRE AVEC SON OEUVRE

Guillaume des Autelz est, sans doute, le premier à avoir rejeté l’authenticité de la grande légende troyenne, des origines françaises; ensuite, cette légende est développée par Nicolas Gilles, Guillaume du Bellay et par Ronsard.
Mais dans son oeuvre l’auteur français nous donne des détails où il critique le style poétique de l’époque.
Dès le début du livre, il dit clairement de préférer l’art du vieux temps.
A la différence des deux frères du Bellay et de Montaigne, qui admiraient César, Guillaume des Autelz se moque de l’historien romain.
En effet, il dit: “Regardez moy un petit Jules Cesar racontant ses vaillances, vous semble il point voir Mahomet en son Alchoran, escrire sa grande saincteté, dignité Prophetique, et force tres admirable?”.[52]
On peut ajouter qu’après s ‘être moqué des “tours”, des “contretours” et des “outreports” lyriques, des Autelz s’intéresse à un autre groupe de poètes que ceux qu’il a déjà nommés: “Laissons ceux là: qui sont ceux-cy? Ils sont, dit Calliopé, ceux, suyvans la propriété de leur langage, donnent facilement à entendre leurs doctes conceptions à tout le monde”.[53]
On voit donc quelle est l’attitude de l’auteur de la Mitistoire: à l’époque de la Déffence, il se moque des pétrarquistes, des translateurs, des pindariseurs, de Ronsard “fort outrecuidé”, qui “gastoit son vin à force d’eau”.
Des Autelz est partisan des poètes qui observent “la propriété de leur langage” et qui rendent “leur doctes conceptions” intelligibles à tout le monde.
Il condamne aussi les sévérités excessives de Barthélemy Aneau et fait un éloge modéré de l’école lyonnaise et de ceux qui, comme Jacques Peletier du Mans et Pontus de Tyard, ont été les précurseurs de la Pléiade.

CRITIOUES PRECEDENTES

On donnera, maintenant, un rapide regard à la critique qui en général, n’a pas été bénigne avec Guillaume des Autelz.
Lenglet du Fresnoy[54] dit, à propos de la Mitistoire, qu’il s’agit d’un livre gaillard, facétieux et satirique à l’imitation de Rabelais.
Selon Colletet [55] “quoique ce poète ne fut pas admis dans la Pléyade des sept grands poètes de son temps, il fut un de ceux qui en approcha le plus près , et qui par sa doctrine, ou du moins par sa réputation s’en rendit le plus digne”.
Voilà quelques mots de L. Sainéan[56]. Le critique trouve que la Mitistoire constitue le plus important des pastiches rabelaisiens.
Il faut arriver jusqu’à Saulnier, pour trouver une vraie critique avec du sens.
Pour Saulnier, “la Mitistoire est l’œuvre d’un esprit éclairé, intelligent. Peut-être trop intelligent, au sens critique du terme. Il (Guillaume des Autelz) a lu Rabelais, il l’a savouré, il a su déceler plusieurs de ses recettes; mais chez lui les procédés étouffent le rire, ceux qu’il invente comme les autres.
On dirait un galop d’entraînement, où l’artiste veut prendre conscience de son métier, mesurer sa force avant d’écrire le chef-d’œuvre; et son opuscule est en somme une oeuvre de bon grammairien. Mais le chef-d’œuvre romanesque, il ne l’a pas trouvé: aurait-ce été cette suite promise, que l’insuccès de la première partie ne l’engagea pas à écrire ou du moins à publier?
Toute sa vie, des Autelz a frôlé le chef-d’œuvre; toute sa vie il a eu de bonnes idées: mais le chef d’œuvre, c’est avec des mots aussi qu’on le fait; des idées et des mots: deux réussites qu’il exige conjointes. Et des Autelz n’a jamais eu de bonheur que tantôt dans les autres”.[57]
Monsieur Ronald R. Jeffels, de l’Université de British Columbia, pense que: “the Mitistoire Barragouvne serves as an admirable example of the attitude which certain writers of the sixteenth century had towards the works of others; few, it seems, had any scruples about lifting large passages from the writings of their contemporaries without even a mention of the original. The work also serves as an example of the lengths to which the literary pirate could go without fear of legaI or social sanction. By its very brevity the Mitistoire Bar- ragouyne offers almost a literary digest of the first two books of Rabelais; and in this respect some slight credit must be given to des Autelz for the ingenuity he showed in cramming the main features of the Gargantua and the Pantagruel into slightly more than fifty pages. Certainly no other feature of his writing is worthy of our admiration”.[58]
Voilà ce que Margaret Young pense de la Mitistoire: “The ‘mauvais petit livre’ dit not appear so worthless to contemporary readers as it did to later critics. It contains some good jokes, some excellent pages amid much that is dull and crude. Moreover to the 20th century it has a value out of proportion to its intrinsic merit ; those of its references which are not too obscure to be intelligible help to filI out the generaI picture of the mid-l6th century. As an account - untentionally humorous no doubt but none the less authentic - of some of the preoccupations of a shrewd and intelligent observer of the literary scene, it is an invaluable document which cannot be lightly dismissed in the study of the period. It has a further and more particular one in that it provides some hints towards a fuller understanding of the early lire of Des Autelz; it shows too, in a simpathetic light this, at times, solemn and pretentious poet prepared to mock at the affectations of love-learn sonnet-writers and the arrogant fancies of the Pindarists. There are sufficient reasons for preserving this little tale from complete oblivion. Moreover, the very choice of such a medium by Des Autelz is significant; Marotic verse, morality play, Petrarchan sonnets, Pindaric odes, Rabelaisian conte - he tried them alI and at just the right moment.
One may wish for grater talent in des Autelz but one could not demand a finer sense of the need of the day”.[59]
Selon Françon, pour la valeur de la Mitistoire “dirons-nous que les chapitres qui sont rabelaisiens sont ce qu’il y a de moins intéressant dans l’ouvrage? Non seulement la bouffonnerie, la grossièreté, la “gauloiserie” nous paraissent-elles insipides et fatigantes; mais la manière de Rabelais, telle quelle se révéla surtout dans le Tiers livre, et qui consiste à accumuler les citations et les renvois à des textes, la satire des Légistes et des Théologiens est vite fastidieuse. Ce n’est pas, non plus, le pastiche du style de Rabelais, avec ses accumulations de termes, ses énumérations sans fin, et ses éléments burlesques, qui nous retient. Mais la lettre de Happe-bran à son fils Gaudichon, rappelant la lettre de Gargantua a son fils Pantagruel, est très intéressante et, à certains points de vue, remarquable. Ce qui, pourtant, mérite surtout d’être relevé, du point de vue historique, c’est le chapitre consacré aux poètes français. Nous voyons, là, l’opinion de Guillaume des Autelz sur ses compatriotes, et nous pouvons nous rendre compte de son attitude, vers 1552-1555, à l’égard de la poésie française de son temps, et des théories littéraires de la Pléiade”.[60]

MA CRITIOUE A LA MITISTOIRE ET A SON AUTEUR

Il paraît qu’au XVIe siècle, ce livre ai t joui d’une certaine re- nommée, le témoignent les trois éditions de 1559,1574, et 1578. Toutesfois les critiques qui se sont occupés de notre auteur et, plus en général, de la narrativefrag çaise au XVIe siècle, n’ont presque jamais eu d’égard à la Mitistoire Barragouyne, ou, s’ils l’ont traitée,ils l’ont fai t superficiellement, en ne cherchant jamais à voir ou à comprendre ce qu’il pouvait y avoit de valaible.
Ils se sont limités à la cataloguer parmi les œuvres d’imitation rabelaisienne, en se bornant à l’appa- rence, sans jamais “gratter” la surface pour découvrir si, par hasard, elle n’était quelque chose de plus qu’un simple “divertissement d’ étudiant”.
Ce n’est que tout dernièrement que des critiques objectives sur cette oeuvre ont vu le jour, et je fais allusion aux études de V.-L. Saulnier, de M. Young etde M. B’rançon.
De ma part j’ai lu ce livre et j’ai goûté la fraîcheur qui se dégage de ses pages. Le récit se déroule aisément et en maints passages il atteint le comique.
Guillaume des Autelz y démontre des idées hardies, qui méritent des éloges, et sa critique est souvent sagace, pertinente et originale.
Bien que plusieurs épisodes se rattachent à Rabelais, et ici aussi il faut ramener ses emprunts à de justes proportions, le livre n’est pas une plate imitation de Gargantua et de Pantagruel, mais il montre une verve à soi et une ampleur qui en font l’intérêt.
Je concorde pleinement avec V.-L. Saulnier quand il dit que la Mitistoire est l’œuvre d’un esprit éclairé, intelligent; peut-être trop intelligent, au sens critique du terme, et je pense que Guillaume des Autelz, avec son petit livre nous a donné une preuve de son intelligence.
Dans la Mitistoire on découvre une sûreté de jugement, finesse de critique et modération de forme: éléments qui nous révèlent un esprit pondéré, conciliant et ennemi de toute exagération.
Les juristes et le milieu universitaire, les gens d’Eglise et les ordres monastiques: voilà les cibles de sa parodie, et même pas la Cour ne sera épargnée de ses flèches. ç
Bien qu’il n’ait ni la vigueur ni la causticité de Maître François, il a compris le sens intime de l’œuvre de son maître: il a su “rompre l’os et sugcer la sustantificque mouelle”.
Mais le message moral que nous recevons étroitement joint à cette satire des institutions n’est pas notre seule dette à l’égard de Guillaume des Autelz; son œuvre a aussi une valeur historique. En elle nous voyons le spécimen de la vie telle qu’elle se passait durant le XVIe siècle, en France.


CONCLUSION


A travers mon exposition, j’ai essayé de définir l’œuvre de Guillaume des Autelz, c’est-à-dire une création littéraire qui se sert d’un récit pour exprimer autre chose.
Mais il était moins aisé d’établir un critère de valeur et, comme on le souhaite banalement, un principe de jugement.
Le roman, c’est à dire celui qui devient une oeuvre d’art, se définit par des qualités exactement inverses de celles qui font la valeur de la production romanesque courante.
Mais, il faut dire, bien que j’admire Guillaume des Autelz, sa Mitistoire Barragouine ne s’élève pas au-dessus de la masse des livres en circulation, et n’a pas assurée à son auteur la vraie gloire.
Pour un auteur, être connu, être aimé par les lecteurs, n’est pas seulement monter triomphalement les marches qui conduisent au maître-autel de la gIoire.
Mais Guillaume des Autelz et sa Mitistoire Barragouine ne sont pas exclus de l’immortalité, pour leur valeur artistique.
Tout critique - y compris et surtout ce critique qui est le lecteur - a compris, devant l’œuvre de des Autelz, qu’il faut considérer la Mitistoire comme une expérience, un document, et qu’elle n’est jamais d’une prétention excessive et d’une complaisance vulgaire.
Je connais des écoliers qui ont parlé de la Mitistoire durant une conversation en classe (d’école supérieure en France). Ils ont parlé de ce livre parce qu’au cours d’un reportage de la télévision, ils avaient entendu nommer ce livre.
Ils ont demandé conseil au professeur de français, s’ils pouvaient le lire.
Au début le professeur leur avait déconseillé ce petit livre, mais par la suite, il leur a dit de le lire afin de pouvoir se rendre compte du déroulement de la vie qui se passai t durant le XVIe siècle.
En le lisant, les élèves se sont aperçus que l’auteur employait un langage “cru” afin de mettre en évidence la “mauvaise vie” qu’il y avait pendant cette période. En effet, en voyant le personnage Fanfreluche, nous ne pouvons pas donner tort à l’auteur.
Les oeuvres estimables des esthètes ou des technciens, exigent une conversion de routine et d’habitude de la pensée et de la sensibilité pour être lues.
A l’inverse, le roman documentaire, psychologique ou social, passe ces mêmes routines.
L’art de Guillaume des Autelz, n’appartient pas aux formes populaires ni, non plus, aux formes sophistiquées; cependant il s’agit d’un art complet et vivant, art où la médiocrité ne paraît pas, un art - en fin - qui représente encore la totalité de l’homme moderne.
Pour conclure, il faut dire que la Mitistoire Barragouine est toujours belle, souvent admirable, bien que elle ne contient pas le souffle qui a inspiré les plus grands écrivains de France.
Pendant son activité, malgré un style à lui, malgré sa vie assez personnelle et l’expérience de sa jeunesse, Guillaume des Autelz ne sut donner une oeuvre avec un immense frisson, comme Ronsard ou comme du Bellay.
Mais le goût de l’art en général et plus particulièrement de la peinture de la vie du XVle siècle, tout ce qui ennoblit naturellement le cœur de l’homme, resplendit en lui.
Son style moral exactement comme son style d’écrivain est d’une harmonie singulièrement riche.
Comme les prosateurs, il sut retrouver la clarté de la phrase classique en l’animant pourtant de vibrations subtiles où l’art romantique et l’art symboliste se prolongent en s’épurant; le moraliste a corrigé par quelques gouttes de lyrisme humanitaire, discrètement filtré, la sécheresse d’une morale simplement raisonnable.
Dans un temps où les valeurs étaient comme à la refonte et les âmes dans l’attente d’une nouvelle raison, Guillaume des Autelz a réussi, avec les meilleurs traditions, à construire une esthétique et une morale classique qui ne sont - peut-être - que provisoires, mais qui ont du moins le mérite de fournir immédiatement des règles acceptables. Il a pour lui le parti de l’homme qui n’a plus le plaisir de se consumer dans les fièvres inutiles.
Et pourtant, il ne se laisse pas séduire d’autres plus jeunes ou qui, de tout âge, n’ont pas renoncé à entretenir en eux une fièvre instigatrice de dépassement.
Il garde quelque chose de plus intime et de plus précieux que sa confiance: son estime et son admiration.

Le texte de la Mitistoire que je reproduis est ce-lui de l’edition del 1574 (Lyon, Jean Dieppi).

J’ai modifié la pontuaction, presque inexistante dans le texte et j’ai apporté des variation otohgraphiques: j’ai distingué les u des v et les i des j.

Le texte est accompagné:

  1. De la traduction en Francais moderne des mots les plus difficiles à comprendre

  2. D’un documentaire très sobre, où j’ai voulu seulement indiquer les références des principaux emprunts de des Autelz, les allusion à la grande ou a la petite histoire, élucider certains passages obscurs, expiquer - quand’il est necessaire - la pensée de l’écrivain.


[1] H. CHAMARD - Histoire de la Pléiade, (Paris, Didier, 1961) vol. IV°, pag.275[2] Nous ne savons rien sur cette maîtresse du poète, sinon qu’elle était de Romans, en Dauphiné, où des Autels passa une grande partie de sa jeunesse. Elle avait vingt ans en 1553, comme on l’apprend par l ‘inscription de son portrait en tête de L’Amoureux Repos, et cette date s’accorde avec le texte du sonnet XXXV du même ouvrage, où il est dit qu’elle était née le 16 février de l’année en laquelle se fit la ligue de Cambrai.[3] Voici un extrait de cet avis au lecteur: “Ce n’est par audace, lecteur, nj désir d’entreprendre choses plus nouvelles, que ces divins esprits, lesquels avecques toi j’admire premiers auteurs de notre lyre française; que j’ai titré mes vers autrement qu’ils n’ont fait. Mais plus tôst tu dois penser, que connaissant la faiblesse de mes épaules non égales au poid du fardeau grec, ou latin je n’ai osé prendre leurs noms: pour crainte de te tromper d’une espérance de voir en mes oeuvres même majesté ….” .

[4] Réplique aux furieuses défenses de Louis Meigret , (Lyon, Jean de Tournes et Guillaume Gazeau, l550, in 8°)

[5] Réplique, op.cit., pag. 62

[6] Réplique, op. cit., pag.58

[7] COLLETET, G. des Autels, édition critique par Ad.Van Bever, “Revue de la Renaissance” vol.VII, l906.

[8] P. DE RONSARD, Le cinquième des odes de P. de Ronsard, (Paris, M. de la Porte, 1553) in 12°, pag.149

[9] J. DU BELLAY, Andini poetae clarissimi Xenia seu Illustrium Quorundam nominum Allusiones ( Paris, F. Morel, 1569).

[10] Continuations des Erreurs amoureuses. Avec un chant en faveur de quelques excellens Poètes de ce Tems. ( Lyon, Jean Tournes, l55 l), in 8°, pag. 59. En tête de l’Amoureux Repos de 1553, on trouve encore un sonnet: Aux Poètes François en faveur de Guillaume des Autels, non signé, mais accompagné de cette devise “Amour immortelle” qui est celle de cet auteur.

[11] GOUJET , Bibliothèque françoise ou histoire de la Littérature françoise, (Paris, 1748) vol. XII, pp. 345-346.

[12] G. COLLETET, Guillaume des Autelz. , édition critique par Ad. Van Bever, dans “Revue de la Renaissance”, (Paris, 1906), vol. VII, pag.202

[13] G. DES AUTELZ, Mitistoire Barragouyne de Fanfreluche et Gaudichon, (Lyon, J. Dieppi, 1547, pag.4

[14] ibid., pag.3

[15] G. BRUNET, Notice sur un livre fort peu connu, faisant partie de la famille rabelaisienne, dans ” Le Bibliophile belge”, (Bruxelles, 184 7) , vol. IV, pag.363.

[16] Nous avons ici un contraste: Guillaume des Autelz en 1560 s’était enroulé dans le parti catholique; comment a-t-il pu publier, en 1574, une oeuvre qui manifeste des opinions favorables aux protestants? L’histoire générale peut nous venir en aide: jusque aux premières années du règne de Henri II, le protestantisme était considéré avec beaucoup de sympathie par les intellectuels et à la Cour même.
Dans Les bibliothèques Françoises de la.Croix du Maine et de Du Verdier, nouvelle édition par M. Rigoley de Juvigny (Paris, Saillant et Nyon, l773), vol. Ier, p.450, on peut lire: “Jean du Bellay penchait beaucoup vers le Luthéranisme. Dans la première partie du XVIe siècle, il y avait deux clans: celui des Guises et celui des du Bellay. Ce dernier groupe était celui des progressistes, des partisans de la nouvelle culture, c’est-à-dire d’une culture, avant tout, intellectuelle, littéraire et esthétique plutôt que d’une culture philosophique, religieuse et morale; l’autre groupe était celui des ténébions”.
En 1551-1552 se produit une réaction anti-romaine et anti-italienne, à l’occasion des démêlés de Henri II et du Pape Jules III, et c’est alors que, vers 1553-1554, on relève dans la littérature française, des manifestations anti-pétrarquistes.

La journée de Saint-Laurent (10 août 1557), à Saint-Quintin, et le traité de Cateau-Cambrésis (1559) qui en fut la conséquence, sont à l’origine d’une séparation profonde de la France en deux camps: celui des catholiques et celui des protestants. A partir de ce moment, il faudra prendre parti. Il s’agit moins d’une conversion de la part de certains intellectuels catholiques que de la nécessité pour eux de faire profession d’adhérer à un groupe qui, socialement, était le leur. D’origine provinciale et paysanne, petit noble appartenant à une terre qui avait été rattachée à la maison des Habsbourg, Guillaume des Autelz était naturellement fidèle au catholicisme. En 1559-1560, il fut amené à se déclarer en faveur du parti des Guises. Voilà comme je me représente l’évolution de Guillaume des Autels. Je ne peux supposer qu’en 1574 il ait cherché à témoigner des sentiments de sympathie à l’égard des protestants ; mais il ne me semble pas impossible de penser que les protestants aient voulu publier un écrit qui leur était, en somme, favorable. On pense au Contre’un, publié pour la première fois en 1576 dans les Mémoires de l’Etat de France de S. Goulard, recueil de pamphlets calvinistes. Cfr. M. FRANCON, édition de la Mythistoire Barragouyne de Fanfreluche et Gaudichon, reproduction photographique de l’édition de Rouen de l578 (Cambridge, U.S.A., Schoenhof’s Foreign Books, 1962), pp. XLVII - XLVIII.

[17] G. DES AUTELZ, op.cit., pag.37

[18] G. DES AUTELZ, op.cit., pag.3

[19] M. RYGOLEY DE JUVIGNY, op. cit., vol. IV, pp. 64-65.

[20] M. YOUNG, Guillaume des Autelz, his life and works, (Genève, Droz, 196l) “Travaux d’Humanisme et Renaissance”, pag.99

[21] J. BOULENGER, Rabelais à travers les âges, (Paris, Le Divan, 1925, in 8°) vol. Ier, pag.430

[22] M. RIGOLEY DE JUVIGNY, op. cit., pag.66

[23] M. FRANCON, op. cit. pag.XXIII.

[24] G. DES AUTELZ, op.cit., pag.5

[25] R. DU BELLAY, Mémoires de Martin et Guillaume du Bellay, (Paris, Bourilly et Vindry, 1908), pag.5.

[26] Jean Dieppi est le pseudonyme de l’Imprimeur Jean Didier.

[27] V.L. SAULNIER, op. cit., pag.281

[28] G. DES AUTELZ, op. cit., pag.66

[29]E. H. BALMAS, Motivi danteschi nell’Eloge de la guerre de Guillaume de Autelz, (Florence, Olschki,1966) “Studi in onore di Italo Siciliano”, pp. 44-45

[30] BRUNET, op. cit., pag.363

[31] V.L. SAULNIER, op. cit. pag.281

[32] F. RABELAIS - Patagruel, Ed. Saulnier, (Paris, Champion, 1946) pag.49

[33] M. YOUNG, op. cit., pag.103

[34] G. DES AUTELZ, op. cit., pag.4

[35] M. FRANcON, op.cit, pag.IV

[36] L.EFEBVRE, Histoire de Franche-Comté, (Paris, Michel, 1912), pag.225

[37] G. DES AUTELZ, op.cit, pag.3

[38] ibid. pag.3

[39] ibid. pag.5

[40] G. DES AUTELZ, op. cit., pag.89

[41] G. DES AUTELZ, op. cit., pag.3

[42]G. DES AUTELZ, Op. cit. pag.12

[43] Ibid. pag.21.

[44] Ibid. pag.51

[45] G.DES AUTELZ, op. c1t., pag.83

[46] G. DES AUTELZ, op.cit., pag.50

[47] Ibid., pag.72

[48] Margaret Young par inadvertance, a dit que s’était Gaudichon qui avait fait l’éloge à Coras. (pag.102)

[49] G. DES AUTELZ, op. cit., pag.24

[50] G. DES AUTELZ, op.cit.,pag.12

[51] Ibid.,pag.13

[52] G. DES AUTELZ, op. cit., pag.5

[53] Ibid., pag.69

[54] L. DU FRESNOI, Bibliothèque des Romans avec des remarques critiques sur leur choix et leurs différentes Editions, (Edit. Amsterdam, 1734), vol.I57

[55] G. COLLETET, op. cit. pag.193

[56] L. SAINEAN, L’influence et la réputation de Rabelais, (Paris, Gamber, 1930), pag.23

[57] V.L. SAULNIER, op. cit. pag.295

[58] R. R. JEFFELS, Des Autelz and his Pastiche of Rabelais dans: “Revue Université Ottawa”, tome 28, Ottawa 1958, pag.27

[59] M. YOUNG, Guillaume des Autelz his life and work, (Ed. Droz, Genève 1961), “Travaux d’Humanisme et Renaissance”, pag.113

[60]FRANCON, op.cit., pp.XLVIII-XLIX

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